Après des vacances en famille pluvieuses -
et donc studieuses en dehors d'une soirée aux fêtes
de Bayonne -, je suis parti une semaine chez des amis tunisiens.
Je suis d'ailleurs heureux de me rendre en Tunisie pour la première fois, juste après la " Révolution tunisienne " et la chute de Ben Ali - surtout après toutes les compromissions avérées de plusieurs ministres actuels.
C'est l'occasion, après la soirée très intéressante que nous avions organisé en Mairie du 13e sur le " Printemps arabe ", d'essayer de mieux comprendre l'évolution de ce pays.
Après cet espoir merveilleux, poussé par l'appétence de tout un peuple pour la démocratie et la justice, l'avenir n'en reste pas moins incertain.
Ni empli d'un angélisme béat, ni pessimiste par essence, j'ai essayé de décrypter les quelques signes que j'avais sous les yeux. J'étais toutefois conscient que j'arrivais dans une période particulière : en plein mois du Ramadan et dans un pays très largement - et à tort, car il n'y a aucun danger véritable - déserté de ses touristes.
Très clairement - et les multiples discussions que j'ai pu avoir l'ont confirmé - les " barbus " - terme employé par les autochtones laïques - sont à l'oeuvre.
Les histoires abondent de cafetiers menacés pour avoir servi de la nourriture en journée pendant le Ramadan, du retour important d'exaltés revenus au pays pour se lancer dans de grandes campagnes de prosélytisme ou de l'argent du Golfe déversé sur les partis religieux. Sans doute, certains propos sont exagérés ou fantasmés. Toujours est-il qu'en effet, l'on voit apparaître quelques " fantômes " - femmes voilées de la burqa noire, pourtant inexistante dans la tradition tunisienne - et de pratiques nouvelles - des cafés " réservés aux touristes " et interdisant leur accès aux Tunisiens ou des établissements qui renoncent pour la première fois à ouvrir leur portes dans les journées de Ramadan.
C'est cependant surtout l'incertitude qui règne. La démocratie est loin d'avoir vaincu dans les esprits et beaucoup de Tunisiens ne se sont pas inscrits sur les listes électorales. Nombre d'entre eux restent circonspects - il faut dire, à leur décharge, qu'ils ont vécu nombre d'élections truquées - et ne comprennent pas le principe d'Assemblée constitutionnelle ou s'interrogent à juste raison sur le pullulement des partis nouvellement créés - plus d'une centaine.
Plus encore, la Tunisie se cherche des leaders politiques et souhaite retrouver un semblant d'ordre et de prospérité économique. Il faut dire que les policiers, largement déconsidérés pour avoir été les serviteurs zélés de l'ancien régime, n'ont plus beaucoup d'autorité auprès de la population, ni même auprès de réfugiés libyens, arrivés en nombre, et qui ont une lecture assez étonnante du Code de la Route.
Les signes d'un certain délitement des pouvoirs publics sont aussi très visibles : dans nombre de communes et y compris dans la Capitale, les ordures ne sont plus ou mal ramassées. Autre sujet de fort agacement, beaucoup de promoteurs ou tout simplement de riches particuliers profitent de l'affaiblissement de l'état de droit pour engager des chantiers illégaux et non conformes à la réglementation. Gageons au moins que ces acteurs ont confiance dans le développement futur de l'économie de leur pays.
J'espère donc deux choses. Tout d'abord que le poids des partis radicaux religieux ne sera pas trop important. Si la Tunisie, l'un pays du Maghreb les plus éduqués et les plus " libéraux " au moins sur le plan de la condition des femmes, cède aux sirènes du fanatisme, il y aura de quoi être inquiet pour l'avenir de toute l'Afrique du Nord. Mais nous n'en sommes pas là. Mon deuxième souhait, sans doute largement lié au premier, est que ce pays attachant retrouve vite le chemin de la croissance. Il a de sérieux atouts : des ressources naturelles, une industrie touristique bien organisée et qui ne demande qu'à renaître de ses cendres et une position stratégique qui pourrait être déterminante demain si la Libye se libérait du joug de Kadhafi.
J'en reviens à des considérations plus légères. Même en Tunisie, j'ai pu assouvir ma passion pour le Street Art et rencontré un jeune artiste de l'art urbain tunisien -
le seul ? - et très talentueux. Il s'agit de Zed. Il est d'ailleurs le fils - les chats ne font pas des chiens -
d'un grand Professeur des Beaux Arts. Il faut dire que je le connaissais avant de me rendre en Tunisie.
Zed est celui à l'origine du symbole de la " Révolution tunisienne ", image qui a largement circulé sur la toile. Je l'ai également fait travailler à l'occasion de l'inauguration de la rue Watt et il a réalisé une magnifique locomotive. Cela complète la carte postale que je vous envoie de Tunisie.
Voilà l'oeuvre de Zed qui est devenue sur la toile l'emblème de la révolution tunisienne.
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